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 Les actions des jeunes contre le CPE - chronique (1)

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4 participants
AuteurMessage
lou.A.S-Garcia
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lou.A.S-Garcia


Nombre de messages : 14
Localisation: : Montréal
Date d'inscription : 07/01/2006

Les actions des jeunes contre le CPE - chronique (1) Empty
MessageSujet: Les actions des jeunes contre le CPE - chronique (1)   Les actions des jeunes contre le CPE - chronique (1) EmptyLun 13 Mar - 12:39

Je suis étudiante en philo à Paris 1.
Je fais partie des 27 "interpellés" de la Résidence de Saint Michel, et il s'agit ici d'éclairer ce qui s'est passé la nuit du 10 au 11 mars 2006, devant la Sorbonne.
L'occupation de la Sorbonne a en effet donné lieu à une nuit bien plus retentissante qu'on peut l'imaginer, et surtout plus que les médias le font croire, sur les goudrons parisiens, vibrant de notre colère.
Je me suis rendue à 23h39 à la Sorbonne, vendredi 10 mars. J'avais été prévenue par le site http://indymedia.org, de la nécessité croissante de rassembler un maximum d'étudiants place de la Sorbonne de manière à soutenir ceux qui l'occupaient depuis 17h - qu'est-ce que je regrette de ne pas avoir pu être là plus tôt... Je suis arrivée par la Rue Cujas, et cette heure-là des CRS campaient à chaque entrée de l'édifice, et à quelques fenêtres du rez-de-chaussée, des étudiantes en appelaient à une "conversation" avec eux... sans succès. A droite, Rue Cousin, des barrières et des CRS, un peu plus massés. Descendue jusqu'au Bd St Michel, encore vide de déploiements à cette heure là, régnait une ambiance festive, mais surtout agonistique, qui venait de devant la place de la Sorbonne. Une barricade avait été édifiée coté Sud, direction Luxembourg, et des cordons délimitaient la partie du Boulevard devant la Place, où se trouvait un cordon de CRS, à peu près au milieu de la Place, je crois, au début.
Je suis passé, ma petite taille aidant, dans la zone devant la place de la Sorbonne, sorte d'avant-scène du drame qui s'est joué à rideaux fermés dans l'enceinte même de l'université, et c'est en traversant cette zone de forte pression que j'ai senti pour la première fois l'odeur des lacrymogènes. L'accès d'étudiants, même intrépides, dans la fac était impossible, désormais. Il y avait à cette heure là environ 300 personnes à l'intérieur.
Les étudiants ont commencé à faire groupe autour de la place, de chaque coté, avec un groupe me semble-t-il plus compact coté gauche où je me trouvais alors, non loin de photographes. La situation ne m'a pas encore semblée assez tendue pour m'empêcher d'aller voir la situation Rue des Ecoles et Rue Saint Jacques, la première étant alors assez calme, si ce n'est qu'aucune porte ou grille n'était accessible, et le trottoir gauche de la Rue Saint Jacques n'était pas non plus parcourable. Ce que je regrette de ne pas avoir remarqué alors, c'est que le petit passage, rue Champollion, qui donnait directement de la Rue des Ecoles à la Place de la Sorbonne, était vide de CRS, et complètement négligé par eux jusqu'à 4h du matin...
Cherchant un compagnon de route, avec qui j'avais rendez-vous bd Saint Michel, j'ai refait le tour, Rue Saint Jacques, rue Soufflot, parce que la rue Cujas était déjà minée de barrières etc., puis rue Cujas, que j'ai rejointe par la rue Toullier, jusqu'au boulevard, et arrivée près de la Place, par Luxembourg, j'ai senti encore plus fort les lacrymogènes. Mais cela n'empêchait pas les étudiants de rester. Quelques minutes d'attente ont excité ma volonté de passer du coté Nord de l'avenue, où la barricade était humaine, et c'est celle là même qui imposait le rapport de force le plus tendu avec les CRS qui avaient tendance à sortir de ce coté de la Place. La colère contre la violence aveugle des gaz aidant, s'est progressivement formé un cordon compact et à plusieurs couches d'étudiants, enchaînés pour une fois les uns aux autres, scandant "CRS fascistes, étudiants pacifistes", et autres slogans du même genre, à quelques mètres seulement d'eux, qui pulvérisaient de l'aérosol sur quiconque tentait de les approcher, même pour parler.
La mobilisation avait été très fructueuse, et nous sachions aussi pas mal des nôtres dans l'enceinte même de la Sorbonne, ce qui avait déjà un poids symbolique suffisamment rarement atteint pour galvaniser le soutien et l'acharnement dont nous faisions preuve devant les CRS. Le mur que nous formions était effroyablement mouvant, nos slogans, notre colère, notre détermination, notre volontés, nos corps enchaînés tendaient vers les CRS, et quelques uns d'entre nous géraient nos avancées, retranchant finalement les CRS jusqu'au trottoir limitant la place au boulevard, et même un peu plus loin. Je pense d'ailleurs que les jets de pierres, et de bouteilles, vraiment dangereux, et surtout pour nous-mêmes étudiants, qui ne portons pas de casques et de vêtements aussi protecteurs que ceux d'en face, ont aussi permis que notre avancée soit relativement plus efficace et spectaculaire que leurs attaques à la lacrymo et à la terreur sonore, en tapant sur leurs boucliers par exemple. C'est dans une des retraites que nous avons fait pendant ce rapport de force que j'ai retrouvé mon compagnon. C'est là que nous avons maintenu et fait progresser, dans un état de peur, de tension et de colère intenses, une chaîne HUMAINE vraiment unie, tribalement, décidément. Mais avec, pour moi du moins, une peur infinie, presque un sentiment d'impuissance derrière une rage de fauve, une tension entre leur menace d'avancer, la menace brute de ceux à qui on a donné la légitimité de nous traiter comme des criminels, et notre menace d'occuper la Sorbonne. Et en même temps, cela stimulait une lutte assez désespérée pour ne pas être ressentie comme absurde. Une entièreté du non, une complétude dans le refus de cette non-éthique dont on nous rabâche les oreilles par les conséquences pratiques qu'il faut en créer, emplois précaires et travail à coût continuement réduit.
Et alors, au bout d'un certain temps, la tension a changé de forme, la ligne des CRS était tracée, et la notre s'est faite plus festive. Au fur et à mesure, les sons des percussions improvisées se sont mis à diriger les pas, les rythmes des slogans, les esprits, les ressentis, et a guidé à des sourires, à une détermination pacifiste telle qu'elle se concentre parfaitement dans cette image tellement célèbre d'une fille présentant une marguerite à un soldat qui pointe sur elle sa baïonnette. Et avec mon compagnon, nous nous sommes mis à danser, à tournoyer, un peu éméchés, émus plutôt, dans les vapeurs de cigarette et de lacrymogènes. Et nous étions dans notre insouciance, trop près des CRS pour que dans leur sadique colère, ils n'en profitent pas. l'un d'entre eux, dont je garde farouchement et hargneusement le visage dans l'esprit, a bondi de La Ligne, et nous a aspergé soudain, pendant que nous dansions, de cet aérosol brûlant. Projetés chacun d'un coté, entraînés par d'autres manifestants, tout a disparu. Je crachais mes poumons, j'hurlai tant le visage me brûlait, et tant la respiration était un supplice. Et les yeux... j'ai cru perdre la vue pendant de longues minutes, je ne supportais pas le sérum que des bonnes âmes m'administrait généreusement. L'attente de l'accalmie de cette brûlure m'a semblée énorme. Mon foulard était chargé de cette horreur chimique, à tel point que maintenant il pourrait servir de projectile nocif... A peine l'effet de ce lacrymogène était passé que je précipitais, retenue par d'autres, vers ce chien qui riait de son affreuse blague. Devant ses sarcasmes, devant le groupe de ces moins qu'humains, la chaîne s'est soudain reformée, et j'étais là, devant, devant celui qui tenait sa bombe dans la main, érigée comme sa fierté dérisoire. Et nous avons passé de longues demi-heures à garder la ligne, à 30 cm des forces de "l'ordre" comme on les appelle, sans violence justement, avec des piques plaisantines, un ton badin, à exacerber chez eux le genre de tension que Schwartzi ressent quand il a le doigt sur la gâchette sur un criminel qui sort une blague qu'il ne comprend pas mais qu'il ne peut pas encore tirer par il ne pourra jamais faire passer ça pour de la légitime défense... Cela a duré longtemps - conversations de sourds, deux groupes structurés de manières totalement irréductible, d'un coté l'application aveugle des ordres, de l'autre, un groupe de gens, d'humains, dont les idées fondamentales ne diffèrent pas tant entre elles que la manière qu'on a de se considérer soi-même et au milieu des autres, pour mettre ces idées en oeuvre...
Et finalement, c'est de notre coté que les rangs se sont clairsemés, à la déception de nombre d'entre nous, parce qu'il fallait trouver de quoi boire et de quoi alimenter le feu qui nous réchauffait, devant la Place de la Sorbonne. Nous avons alors entr'aperçu, derrière le rang de CRS auquel nous faisions face, d'autres forces qui semblaient se diriger vers les portes de la Sorbonne, coté rue de la Sorbonne, 17 et 19. Quelques compagnons, autour du feu, revenaient de la rue des Ecoles où les choses commençaient sérieusement à se corser. Il semblait que le n°46 était ouvert. Il fallait des photographes pour rendre compte de la situation. Nous les avons suivi, l'assaut semblait imminent.
Par centaines, gendarmes et policiers, libérés de tout antagonisme, pour une fois, se massaient rue des Ecoles et surtout rue de Saint-Jacques, pour rentrer dans la Sorbonne. La rue des Ecoles était bouclée, à partir du croisement avec la rue Saint Jacques ; là il y avait des cars de gendarmes jusqu'à la rue Monge, et aussi de manière à ne pas pouvoir faire autre chose que tourner à gauche vers le bd Saint Michel en venant de la rue des Ecoles. De toutes manières, ils allaient déloger les étudiants de la Sorbonne. Nous avons passé un peu de temps là, pour constater aussi que les forces de l'ordre demandaient au journalistes et photographes de ne pas fimer ni prendre de photos avant qu'on le leur dise... Quelques étudiants dont moi dansaient et tournaient autour des gendarmes en leur promettant que des nuits comme celle là se reproduiraient, et que malgré notre faiblesse et nos défaites, nous leurs causerions autant d'insomnies et de troubles que des cafards ou des rats, ou leurs femmes acariâtres...
Et je crois que c'est une clameur de lutte qui nous a poussés à retourner à la Place de la Sorbonne, pour voir ce qui s'y passait. Sur le trajet, il devait être 3h30, nous avons constaté que les choses avaient vraiment mal évolué - en même temps, tout était prévu depuis au moins vendredi matin, de leur coté... Il y avait un déploiement titanesque, au moins sept fois trop important par rapport à l'ampleur de notre manifestation ; c'est probablement ce qui a fait que notre action s'est voulue aussi spectaculaire et marquante, d'ailleurs... Le haut du boulevard Saint Michel a été progressivement bloqué par deux grands cars de CRS, entourés d'un déploiement non négligeable de CRS encasqués, à partir de la rue des Ecoles. Quelques petites rues plus loin, toujours sur la rue des Ecoles, il y a ce passage qui mène directement de la Rue des Ecoles à la Place, qui s'appelle Rue Champollion. Cette rue qui n'a été occupée qu'à partir de 4h par les CRS que nous avons suivis, juste avant la charge finale. Et faute de temps, nous les avons suivi et non précédés. Cette dernière rue aurait pu être leur point faible. Se retournant au bout de la rue, les CRS pointaient leur Flashballs sur nous... Nous nous sommes repliés, et nous avons rejoint la place de la Sorbonne par le boulevard Saint Michel; là, l'ébriété la colère, et la tension aidant, malgré le nombre décroissant de manifestants, les barricades tenaient, les bouteilles fusaient sur les CRS, et le feu perdurait. Les CRS d'ailleurs, étaient plus loin sur la place qu'avant, ils avaient encore reculé. Et là, images que je ne souhaiterais pas oublier : je crois qu'ils ont fondu sur deux personnes qui étaient un peu trop près de la ligne pour les tabasser derrière leurs rangs. Quelques minutes plus tard, notre colère était grondante, mais trop vote apaisée : ils en ont profité pour saisir par les bras et les jambes un étudiant, complètement ivre, certes, qui était là depuis le début, et qui me semblait pas le plus belliqueux d'entre nous. Ils l'ont traîné sans ménagement, négligeant son dos qui s'arrachait sur les dalles et les tessons qui les jonchaient, et l'ont matraqué autant que leur légitimité et leur agressivité exacerbée le permettait... Cette image a causé bien des larmes chez pas mal de filles, et de la colère en bouteilles de verre chez d'autres. Cela s'est passé si vite. Et les journalistes, pendant CE temps là, faisaient leur pause clope. Cette violence soudain ne me semblaient plus tant venir de nous que d'eux... D'ailleurs, j'ai eu le sentiment, que c'est à ce moment là que tous les freins, coté manifestants, ont lâché. C’était comme si on ne pouvait plus réagir autrement que par un débordement de violence, même si justement c’est exactement vers ce retranchement qu’ils nous ont poussés, de manière à nous décrédibiliser totalement, comme les jeunes des banlieues. En même temps, je ne pense plus qu’une action contre l’ordre établi puisse perdurer longtemps en se cantonnant à ce qu’elle a le droit de déployer, comme actions de lutte. Nous avons en quelque sorte trop peur d’être hors-la-loi alors qu’une telle situation où quelque chose doit effectivement être renversé, implique qu’on outrepasse, avec la mesure d’une action qu’on veut efficace et fructueuse bien sûr, les lois qui appartiennent non pas à toute la communauté humaine mais à ce système précis que nous disons remettre en cause – alors que nous en respectons encore les lois…
A suivre!!
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MessageSujet: Re: Les actions des jeunes contre le CPE - chronique (1)   Les actions des jeunes contre le CPE - chronique (1) EmptyDim 19 Mar - 2:30

Idem que le chronique 2 pour la mise en page.....
mais c'est super sinon ce que tu ecrit et telement bien ecrit.
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MessageSujet: Re: Les actions des jeunes contre le CPE - chronique (1)   Les actions des jeunes contre le CPE - chronique (1) EmptyDim 19 Mar - 3:10

oula! merci pr le récit coté grêviste, parce que les médias...
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MessageSujet: Re: Les actions des jeunes contre le CPE - chronique (1)   Les actions des jeunes contre le CPE - chronique (1) EmptyLun 20 Mar - 23:38

sa se voit que tu es en fac de philo....
ta une facilité a reproduire tes sentiments à l'écrit

c'est juste magique

(c'est pas SOS compliment je le pense vraiment, on est ému en lisant sa parce que sa fait passer un truc impalpable sur la revolte l'impuissance face au homme armure enfin bref)
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